Archive for February, 2019

February 24, 2019

Félix Adégnika, membre de la coalition de la société civile au Bénin à Africasan5 « Nous allons travailler pour que notre pays tienne ses engagements internationaux »

Félix Adégnika, Coordonnateur national du Wssc

Coordonnateur National du Conseil de concertation pour l’approvisionnement en eau et l’assainissement (Wsscc), Félix Adégnika est un membre actif du Cadre de concertation des acteurs non étatiques et l’eau et de l’assainissement (CANEA) au Bénin. Présent à toutes les éditions de la conférence panafricaine sur l’assainissement, il revient dans cet entretien sur l’importance pour les Etats de s’engager dans la bonne Gestion des boues de vidange (Gbv) et nous confie les prochaines actions qu’entrevoit la société civile active dans le secteur  au Bénin pour susciter un engagement des décideurs.

 Vous avez participé à toutes les éditions de la conférence Africasan et cette fois-ci, on a choisi de mettre au centre des discussions, la question de la Gestion des boues de vidange. Vous trouvez que c’est vraiment important ?

C’est vrai, j’ai participé à toutes les éditions de Africasan. C’est un privilège mais je viens à la recherche de l’information. La question de la Gestion des boues de vidange est une problématique urbaine. Parce que, d’ici 2050, plus de la moitié des populations des pays vivront dans les villes. C’est à la fois un problème et une opportunité. Dans une approche intégrée qui concerne le transport, le traitement et la valorisation, il faudra avoir les infrastructures et les équipements pour faire face à cette problématique. C’est une opportunité parce que cela peut profiter à l’agriculture urbaine. Notre système, celui du Bénin où il n’y a pas un réseau d’égout, c’est l’assainissement autonome. Il y a des défis à tous les niveaux qu’il faut relever très rapidement.

A l’ouverture de cette grande conférence, le ministre sud-africain, Gugile Ernest Nkwinti, a demandé aux Etats de changer de priorités et d’élever au rang des priorités, la question de l’Hygiène et de l’Assainissement de base. Est-ce que dans votre pays, l’hygiène et l’assainissement ne constitue pas encore une priorité ?

Le ministre sud-africain a dit effectivement qu’il faut changer de priorités et moi j’ajouterai qu’il faut changer de paradigme par rapport à l’HAB. Aujourd’hui, l’HAB n’est pas une priorité au Bénin. Le sous-secteur est totalement en bas de l’échelle des priorités. Parce que si c’est une priorité, cela devrait figurer clairement dans l’agenda de développement et les ressources qu’il faut mobiliser, devraient être disponibles. Mais, ce n’est pas encore le cas. En plus, ce sous-secteur ne bénéficie pas d’un bon positionnement institutionnel.

Mais qu’est-ce qui explique ce manque de priorisation et d’attention de la part des décideurs pour ce sous-secteur pourtant important pour la santé, l’éducation et la vite tout court?

C’est par manque d’informations et de connaissances. Je suis convaincu que les décideurs ne sont pas engagés parce que ‘ils n’ont pas pris la mesure de l’importance de ce sous-secteur. Et nous nous engageons à apporter la bonne information pour arriver au changement de paradigme.

Vous êtes un acteur de la société civile très actif au sein du Cadre de Concertation des acteurs Non Etatiques de l’eau et de l’assainissement, que faites-vous au sein de cette coalition pour relever le défi de la faible priorisation du sous-secteur au niveau du Bénin ?

Nous devons informer et amener les autorités à comprendre que nous devons agir maintenant. Nous avons deux outils, le plaidoyer et le lobbying. Mais, il semble que la société civile se trompe de cibles parce que, nous nous adressons  directement aux décideurs. Il semble que la première cible doit être les fonctionnaires qui sont chargés de présenter la situation aux autorités. Parce que je ne suis pas sûr que les autorités sont conscientes de la situation et de la problématique. C’est un impératif de travailler sur plusieurs fronts. Il faut comme cibles, en dehors des fonctionnaires du sous-secteur, des politiques et stratégies, les cabinets ministériels, les décideurs que sont les maires et autorités centrales. Et par rapport à cela, il nous faut beaucoup communiquer. Nous devons avoir un partenariat fort avec les médias pour provoquer un engagement de tous et permettre d’atteindre les objectifs.

Au niveau de l’Afrique, on retient que les engagements de Ngor n’ont pas été tenus par la plupart des pays. Comment faire pour que le Bénin relève le défi d’ici le prochain sommet?

Avec le temps que nous passons ici avec le Directeur national de la santé publique présent à cette conférence, nous n’avons pas une garantie ferme mais lui-même a vu ce que les autres pays font. Il a compris qu’il est possible de faire des petits pas et il a pris l’engagement de nous accompagner. Dès que nous allons rentrer, nous allons organiser un point de presse pour informer sur la situation en Afrique et dans notre pays. Et nous allons travailler pour que notre pays tienne les engagements qu’il a pris au niveau international.

Quel sera votre message concrètement au retour de ce sommet à Cotonou ?

Nous avons plusieurs cibles : les décideurs, les cadres et les communautés. Notre message pour les autorités locales, c’est de leur dire qu’elles ne perdent rien à s’engager dans l’hygiène et l’assainissement de base et à accompagner les efforts des ONG et de l’Etat central. Ensuite, nous devons communiquer sur les engagements pour ne pas attendre la veille des sommets et conférences pour courir et faire l’évaluation. Nous devons faire un suivi. Pour les autorités locales, c’est de faire en sorte que dans leurs budgets, qu’elles prévoient une ligne budgétaire pour le sous-secteur. Il y a eu déjà un déclenchement au niveau des préfets qui se sont engagés à désormais regarder ce qui est prévu pour le sous-secteur dans les budgets des communes. Enfin, il y a les Directeurs de la programmation et de la prospective (DPP) des ministères au cœur des prévisions et programmations. Il faut les amener également à s’ouvrir au sous-secteur au niveau des allocations dans les ministères.

                                                                             Propos recueillis par Alain TOSSOUNON depuis Cape Town

 

 

February 22, 2019

Pius Cossi Gounadon au sommet Africasan5 : “Il est temps de changer de paradigme”

Pius Cossi Gounadon, Directeur national de la santé publique (DNSP) au ministère de la santé

A l’instar des autres pays, le Bénin est présent au sommet Africasan5 à travers plusieurs représentants provenant de plusieurs structures. Nous avons rencontré pour vous, le Directeur national de la santé publique (Dnsp) qui représente le ministre de la santé en charge de l’hygiène et de l’assainissement de base. Dans cet entretien, il nous confie son appréciation des échanges qui ont cours et surtout, nous révèle les prochains pas à faire après le sommet pour permettre au Bénin de relever le défi de ce sous-secteur en souffrance.

Vous prenez part à la 5eConférence panafricaine sur l’assainissement en tant que chef de délégation du Bénin. Que vous inspire une telle conférence qui concourt à amener les Etats africains à réaliser l’accès universel de tous aux services d’assainissement ?

C’est ma première participation à cette conférence et j’avoue qu’elle a un caractère instructif. Il y a beaucoup d’échanges, d’apprentissage et de partage d’expériences. Surtout, j’apprécie le niveau d’engagement de tous les acteurs ici présents. Je n’avais pas cette compréhension du niveau d’engagement des partenaires, des experts et de tous les acteurs. Cet évènement m’a permis de remettre en place l’idée que l’hygiène de l’assainissement de base bénéficie d’un engagement soutenu de plusieurs acteurs et partenaires dans le monde et en Afrique.

A l’ouverture du sommet, le ministre sud-africain de l’eau et de l’assainissement a invité tous les Etats à inscrire l’hygiène et l’assainissement au rang des priorités de leur agenda de développement. Est-ce qu’au Bénin, ce sous-secteur bénéficie d’une attention soutenue ?

Je partage l’exhortation du ministre sud-africain et je peux dire que le sous-secteur constitue une priorité dans le Programme d’Actions du Gouvernement. Le gouvernement travaille pour cela. Mais le paradigme doit changer. Souvent, on voit dans cette lutte que le ministère de la santé, du cadre de vie et celui de l’eau. Il faut que ce combat, pour être gagné, soit celui de tous les ministères à l’instar de ce que fait l’Inde.

A l’évaluation des engagements de Ngor, on se rend compte qu’il y a eu peu de progrès dans les pays. C’est le cas au Bénin également. Selon vous qu’est-ce qui explique une telle situation ?

Au Bénin on vient de terminer un plan quinquennal et il a été évalué en 2018. Nous avons vu les faiblesses et sur la base des défis identifiés, des orientations claires ont été prises dans la stratégie 2019-2030. Et au nombre des grandes orientations retenues, nous avons la gouvernance et le leadership, la coordination des interventions qui est importante et le problème des ressources humaines et financières. Souvent, on pense aux ressources financières alors que nous avons besoin de ressources humaines en quantité et en qualité. On peut mobiliser les ressources financières. Je salue les communes comme Za-Kpota, Malanville ou Abomey qui font déjà des efforts.

Au cours de ce sommet, l’un des messages forts est l’importance du leadership notamment les champions qui permettent d’impulser le mouvement. Vous comptez le faire aussi ?

Il faut mobiliser tous les acteurs. Il est important qu’ils se retrouvent pour partager les idées et les solutions et surtout prendre exemple sur les pays modèles en Afrique comme dans le monde. En Inde par exemple, l’hygiène et l’assainissement est un secteur porté par le premier ministre. Ainsi, chaque ministère est invité à agir et apporter sa contribution. Le leadership est au rendez-vous au haut niveau.

Vous avez participé au dialogue entre les pays. Qu’avez-vous retenu de cet exercice de partage d’expériences entre les pays ?

En dehors de quelques différences près en matière de leadership et de mobilisation de ressources financières, les pays ont les mêmes réalités. Nous avons beaucoup appris de cet exercice et nous avons compris qu’il y a certains pays qui sont en avance sur l’ancrage institutionnel. Dans la plupart des pays, l’eau et l’assainissement sont deux secteurs qui sont ensemble. C’est une stratégie qui permet de mutualiser les ressources vu qu’il y a souvent plus de ressources pour l’eau contrairement à l’assainissement. Les échanges ont été très fructueux.

A ce sommet, vous représentez le ministre de la santé en charge du sous-secteur de l’hygiène et de l’assainissement de base. Quel message lui porterez-vous une fois au pays pour impulser une nouvelle dynamique et faire en sorte que le Bénin tienne ses engagements ?

C’est en 2015 à Dakar que les engagements de Ngor ont été pris. A l’évaluation, il n’y a pas eu beaucoup d’avancées dans les pays en dehors de quelques pays qui ont eu des progrès. Nous souhaitons que notre participation ne soit pas seulement protocolaire mais qu’elle contribue à apporter des changements. Déjà, il nous faut mobiliser les cadres du service pour faire le lobbying au niveau de notre ministre pour lui présenter la situation. Il est temps de changer de paradigme. La façon dont nous fonctionnaires agissons doit être revue pour que nous soyons plus efficaces. Car, avec ce que nous faisons, nous ne pouvons pas atteindre les ODD dans ce sous-secteur. Une fois de retour, il nous faut faire un compte rendu fidèle, suggérer à l’autorité des propositions et partager avec lui ce qui se fait de bien ailleurs et qui peut être profitable à notre pays.

              Propos receuillis par Alain TOSSOUNON