Archive for December, 2012

December 19, 2012

Approvisionnement en Eau potable, Hygiène et Assainissement (AEPHA): Les acteurs de l’Alliance Wash à l’école de la durabilité financière

Alain TOSSOUNON (Bénin)

Photo Atelier FIETS Dans le cadre de la mise en œuvre du programme de l’Alliance Wash, les organisations        membres et celles actives dans le secteur AEPHA dans le septentrion,  les mairies des quatre communes bénéficiaires,  les entrepreneurs locaux et les Institutions de Microfinance (IMF), étaient  en session de formation  à l’Hôtel Soleil d’Afrique de Parakou du 5 au 7 décembre 2012. Portant sur le thème «durabilité financière de WASH» et sous la conduite du cabinet néerlandais Waste, l’atelier édifiant en échanges, a été pour les acteurs/entrepreneurs  comme pour les IMF mis face-à-face, une occasion de découvrir les opportunités d’affaires encore inexplorés dans le secteur. Et au-delà, de s’exercer à l’élaboration de  plans d’affaires et à leur défense grâce à un jeu de rôles riche en enseignements.

 

Les participants au cours des travaux de groupe

Gouvernés par cinq  principes fondamentaux (Financier, Institutionnel, Environnement, Technologique et Social)  appelés principes FIETS, les actions de l’Alliance WASH néerlandaise (DWA) et celles du Bénin, visent essentiellement à identifier de nouvelles opportunités de financement. Un travail d’arrache-pied qui passe par l’amélioration des connaissances et le renforcement  des capacités des organisations membres au Bénin (BUPDOS, CEBEDES, DCAM-Bethesda, EAA, Helvetas, PNE-Bénin et Protos-Bénin). Mais également et surtout, de tous les acteurs nationaux et locaux qui interviennent dans le secteur AEPHA. C’est l’enjeu de la session de formation de Parakou qui a mobilisé, en dehors  des autorités locales des communes d’intervention de l’Alliance et des organisations et structures du secteur, les entrepreneurs locaux et les IMF. Un face-à-face inédit acteurs du secteur Wash et IMF qui se justifie selon le Coordonnateur national de l’Alliance Wash, Albert Chabi ETEKA, par la nécessité d’inscrire les actions des acteurs dans la durabilité. Une initiative innovante qui ambitionne de mettre fin aux pannes ou au manque de ressources. Une situation à laquelle, les acteurs Wash sont souvent confrontés pour un secteur aussi vital que celui de l’eau, l’hygiène et l’assainissement. De même, dans un contexte marqué par la dépendance financière mais aussi par la crise financière,  (Les Pays-Bas, un acteur important du secteur Wash au Bénin, réduiront de 25% leurs financements dans les années à venir). Afin de vaincre la fatalité, il y a lieu d’imaginer et d’inventer d’autres formes de financement des actions Wash face aux besoins cruciaux. Ainsi, pour le Coordonnateur Albert Eteka, la session de formation vient en réponse aux questionnements ayant trait à l’accès aux sources de financement nationaux disponibles. D’où la présence des IMFs à cette session de formation.

Dans une partie introductive faite d’exposés, les participants ont eu droit à un éclairage sur les principes de durabilité Financière Institutionnel  Environnemental Technologique et Social (FIETS). Ainsi, si la durabilité financière en tant que principe repose sur le cofinancement par les parties locales (financiers privés), il est nécessaire de bâtir un plan d’affaires pour rendre le rendement positif mais surtout pour contribuer à l’élimination des facteurs qui entravent une approche entrepreneuriale. Seulement, elle ne peut être possible que grâce à une organisation institutionnelle (principe institutionnel) locale responsable de la continuité protégeant les intérêts de multiples actionnaires dans la transparence dans l’utilisation des fonds et ressources. A ces deux principes, il faut ajouter celui de l’environnement  qui permet d’analyser les conséquences sur l’environnement, celui de la technologie qui permet de s’assurer que l’infrastructure reste en fonctionnement et est disponible localement. Et enfin, le principe social axé sur la demande  avec une concentration sur le service de base (les gens ont le droit) et la prise en compte de l’intérêt de tous les citoyens dont les personnes les plus pauvres, vulnérables et défavorisées.

Un bouillon d’échanges édifiants

Une fois les participants éclairés sur les concepts, la session s’est poursuivie avec le visionnage d’un film très instructif sur la vidange manuelle au Kenya et les difficultés/opportunités d’affaires qui s’y présentent. Ce film a provoqué de riches échanges sur les enjeux et défis de l’assainissement de base, les opportunités qu’offre  le secteur au privé mais aussi aux Institutions financières. Pour le deuxième adjoint au maire de Parakou, de façon générale, l’hygiène et l’assainissement ont un coût. Et l’Etat et les collectivités locales ne peuvent continuer à supporter seuls les charges. Aujourd’hui soutient-il, il y a une nécessité d’ouvrir le secteur Wash au privé. Mais, pour encourager le secteur privé, il faudra que les collectivités locales qui ont la compétence, facilitent son implication et que les IMFs l’accompagnent. Seulement, pour que cette activité soit rentable pour le privé, il faut absolument, selon les ONG, que l’assainissement devienne une priorité pour les communes et pour l’Etat.

De même, un travail à la base est indispensable pour amener les communautés à accepter payer le service.  En définitive, il faut à la fois un plaidoyer en direction des autorités pour faire bouger les priorités, encourager et appuyer le secteur privé et surtout sensibiliser les communautés pour les préparer à payer les services.  Abordant la question de la durabilité dans les débats, tous sont tombés d’accord avec les explications de la consultante Jacqueline Barendse du cabinet Waste, qu’elle doit se faire dans la décision et le suivi. Si son importance n’est plus à démontrer, c’est  néanmoins «un monstre» à surmonter. Car, en s’engageant dans toute activité relative au secteur Wash, le privé doit toujours  penser au retour sur l’investissement. Et ce,  même si le gouvernement et les institutions financières financent la réalisation. Préalablement, les autorités doivent gérer la question foncière pour faciliter le travail au secteur privé. Dans ce nouveau schéma où le secteur privé est désormais attendu pour jouer un rôle important, les ONG doivent promouvoir l’entreprenariat et sensibiliser les ménages pour que la durabilité financière soit une réalité.

Par ailleurs, pour relever ce défi de changement de mentalités à tous les niveaux qu’appelle l’alliance Wash, un suivi budgétaire est nécessaire. S’il doit se faire au niveau des budgets de chaque activité ou de chaque acteur, il est aussi impérieux de le faire au niveau national. Car, dans certains cas, des ressources sont  disponibles mais malheureusement, ne parviennent pas aux communes ou aux structures par manque de suivi.

Au total, sur les principes FIETS, tous les participants retiennent désormais que le financement durable est  celui qui est local. C’est pourquoi, à cette session, les autorités locales comme les cadres et agents des mairies, ont été associés de même que le secteur privé ou les entrepreneurs locaux. Surtout, pour les prendre en compte, il faut le faire dès le montage du projet. Enfin, tous les acteurs et membres de l’alliance sont convaincus que le financement local durable est celui qui garantit un accès durable des communautés aux service d’eau potable et d’assainissement.

Un jeu de rôle  pédagogique

Pour allier théorie et pratique, les participants ont  été conviés a monter des plans d’affaires dans quatre groupes différents en tenant grand compte du contexte des communes cibles que sont Sinendé, Kérou, Parakou et Kandi.

Ainsi, après avoir identifié les projets, chaque groupe s’est évertué à concevoir un plan d’affaires avec l’accompagnement des consultants. Avec la consigne que chaque activité doit répondre aux principes de durabilité, les participants, malgré le contexte d’exercice, se sont appliqués à bâtir de véritables plans d’affaires sur la base des informations dont ils disposent.

Au total, alors que le groupe de  Kandi a choisi de réaliser un Projet d’approvisionnement en eau potable des populations rurales de Kandi,  celui de Kérou a retenu  installer et gérer des latrines ECOSAN dans le marché et la gare routière dans la commune de Kérou. Ensuite, le groupe Sinendé a proposé un Projet de réalisation de 4 blocs de latrines ECOSAN et enfin celui de Parakou, a décidé de mettre en œuvre, un projet de vidange de fosses dans les anciens quartiers de Cotonou.

L’un des temps forts de cet exercice et au-delà, de la session de formation, a été la rencontre des groupes avec les Institutions de micro-finance. Avec des tableaux différents et un effort soutenu de représentation de la réalité, chaque groupe a été appelé à défendre devant un banquier, son plan d’affaires. Les débats et échanges qui ont suivi le passage de chaque groupe, a été très instructif pour les entrepreneurs et acteurs du secteur. Surtout, les réactions et commentaires des représentants des 4 institutions de microfinance (PADME, FECECAM,  PEPCO, SIANSON), ont permis aux uns et aux autres, de mieux appréhender les insuffisances et faiblesses de leurs plans d’affaires. Et en plus, de comprendre le mode de fonctionnement des IMFs ou des banques. L’un des grands enseignements de cet exercice a été l’occasion donnée aux représentants des IMs, de se convaincre que le secteur WASH, même avec ses spécificités, reste et demeure comme les autres secteurs, un secteur porteur où l’on peut faire des affaires. Et les exemples ne manquent pas. C’est le cas de l’initiative d’appui aux ONG de précollecte dans la ville de Parakou que développe l’ONG DCAM et qui fait son bout de chemin. Mais, cette expérience qui fait  tache d’huile doit servir d’exemple pour le financement par les institutions financières du secteur Wash.

En définitive, l’exercice de jeu de rôles  a également permis aux participants, de retenir que devant une institution financière, ce qui compte, c’est non seulement la qualité de l’entrepreneur ou la capacité de remboursement de l’entreprise. Mais aussi, l’expérience du promoteur en matière de gestion de crédits ou les éléments de garantie constituent des atouts. Le système fonctionne comme un «voyage aller-retour» avec des investissements qui doivent générer des bénéfices pour l’entreprise et son promoteur.

Convaincus avec cette formation qu’il y a une opportunité d’affaires et un intérêt commun entre les IMFs et les acteurs ou entrepreneurs dans le secteur WASH, les participants ont au terme de cette session, élaborer des plans d’actions pour chacune des quatre communes. Chaque plan d’action comportant des opportunités d’affaires. Ces différents plans d’actions contribueront à la sensibilisation et à la formation des jeunes et promoteurs en entreprenariat et surtout, accroitre l’intérêt de ceux-ci à faire affaire dans le secteur Wash et pour  promouvoir le financement durable au niveau des 4 communes dans le secteur Wash. A la fin de la formation, les participants ont exprimé toute leur satisfaction et témoigné avoir beaucoup appris de cette formation.

Par ailleurs,  après l’étape de Parakou,  une journée de formation sur ces différents aspects des principes de durabilité FIETS, a été organisée à Cotonou pour informer les directeurs des sociétés de l’Etat, des banques, des Institutions de Microfinance, les autorités administratives, les institutions nationales et internationales ayant des actions dans l’AEPHA au Bénin.

Notons que l’Alliance WASH néerlandaise (DWA) composée de six organisations non gouvernementales (SIMAVI, ICCO, AMREF, RAIN, WASTE, AKVO) vise à renforcer les organisations de la société civile, le secteur privé et le secteur public dans huit pays d’Afrique et d’Asie afin d’améliorer les services autour de l’eau, l’hygiène et l’assainissement. Au Bénin, DWA a signé un contrat de partenariat avec 7 ONG  (BUPDOS, CEBEDES, DCAM-Bethesda, EAA, Helvetas, PNE-Bénin et Protos-Bénin) formant l’Alliance WASH-Benin. Ces ONG sont actives dans l’Approvisionnement en Eau Potable, Hygiène et Assainissement (AEPHA).

December 14, 2012

Forum de haut niveau sur l’eau et l’assainissement pour tous en Afrique: Un vibrant appel pour des investissements plus accrus

Alain TOSSOUNON (Envoyé spécial à Dakar)

Forum EAA_Dakar

Les participants au cours des travaux

Attendu pour être un nouveau départ dans la recherche de financements et investissements innovants pour donner satisfaction aux 300 millions d’africains qui n’ont pas encore accès à l’eau potable et aux 640 millions ne disposant toujours pas d’un assainissement décent, le Forum de haut niveau a été ouvert officiellement le 12 décembre par le président de la République du Sénégal, Macky Sall. En présence des ministres en charge de l’Eau et de l’Assainissement des Etats membres de l’Agence intergouvernementale panafricaine Eau et Assainissement pour l’Afrique (EAA), d’experts, chercheurs, acteurs et partenaires, un appel a été lancé par tous les intervenants pour des investissements conséquents et un intérêt plus manifeste pour les secteurs de l’eau et de l’assainissement.   

A un moment où 50 ans après les indépendances, la moitié des africains n’ont pas accès aux services d’eau et d’assainissement, l’heure n’est plus aux atermoiements et aux tergiversations dans la recherche des solutions pour faire face à  ce défi majeur. Car, malgré l’appel des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) lancé en 2000, l’Afrique et ses Etats peinent toujours à 3 ans de l’échéance de 2015, à mobiliser les ressources nécessaires pour répondre à ces deux services de base. Pour le président Macky Sall, ce retard est fortement lié à la non disponibilité des ressources financières. « Malgré les avancées notables, l’une des principales causes reste la faiblesse des financements et des investissements, comparativement aux besoins », a signalé le chef d’Etat sénégalais. Face au tableau sombre, il a souligné son engagement à  inverser cette tendance au Sénégal. Un engagement qu’il tient de son agenda de développement pour le Sénégal dans lequel, l’accès à l’eau et à l’assainissement reste une priorité. Pour aller plus loin, le président Macky Sall a souligné que son gouvernement s’est engagé à accélérer la mobilisation d’environ  250 milliards de FCFA pour atteindre les objectifs de ce programme d’ici 2015. Et d’appeler tous les autres dirigeants des Etats à lui emboiter le pas tout en saluant la présidente du Libéria, Ellen Johnson Sirleaf, ambassadrice pour la cause de l’eau et de l’assainissement en Afrique, invitée d’honneur de ce forum.

Dans ce combat pour l’accès de tous les Africains à l’eau et à l’assainissement, les communes ne doivent pas être du reste. Elles doivent absolument être à l’avant-garde des solutions durables qui aujourd’hui font défaut. C’est pourquoi le maire de la ville de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, en défendant son engagement, a partagé son amertume de voir que l’accès à l’eau reste encore un luxe pour des milliers d’africains. Ainsi, il a martelé qu’il est aussi de la responsabilité des collectivités locales, de contribuer à trouver des solutions adéquates.
«Il faut que les déchets et eaux usées d’aujourd’hui deviennent les matières premières de demain, c’est plus qu’une nécessité, c’est une urgence », a indiqué le maire de Dakar. Un son de cloche entendu par la Fondation Bill et Melinda Gates dont le représentant, le docteur Abdoulaye Koné,  préconise la mobilisation des chercheurs et des universitaires pour donner une dimension plus rentable au sous-secteur de l’assainissement. Et ce, dans les domaines variés tels que la valorisation des eaux usées, des boues de vidange, la production du biogaz. Intervenant en lieu et place de la présidente du Libéria, le vice-président, Joseph Boaki, a fait un impressionnant plaidoyer pour promouvoir la recherche, conserver les acquis et mettre l’accent sur le suivi et l’évaluation pour mesurer les impacts. «Le temps est venu d’agir », a-t-il indiqué dans son appel à l’action.

Un objectif de 50 millions de personnes  à atteindre d’ici 2015
Décidée à passer au concret, l’Agence intergouvernementale panafricaine pour l’eau et l’assainissement pour l’Afrique (Eaa), ambitionne de  mobiliser des ressources afin d’offrir des services à plus de 50 millions d’africains d’ici à 2015.

Le Forum dédié à cette ambition  reste une opportunité pour imaginer et inventer les solutions en vue de répondre aux besoins des populations africaines. Ainsi, selon le président du Conseil des ministres, Issoufou Issaka, par ailleurs ministre de l’Hydraulique et de l’Environnement du Niger, Eaa s’engage à toucher 50 millions d’africains d’ici à 2015. Parce que tout simplement, « On dit que l’eau, c’est la vie, l’assainissement, c’est la santé, et l’hygiène, c’est la dignité».

C’est sur une note d’espoir que le forum a été lancé avec l’engagement pour les uns comme pour les autres, de redoubler d’efforts pour non seulement mettre l’assainissement comme une priorité dans les agendas des Etats, mais aussi faire recours aux financements innovants dans le contexte de raréfaction des ressources.